L’hiver finissant recèle des beautés particulières. Entre les rigueurs d’une saison froide et la douceur naissante du printemps prochain, voici un instant dont j’ai décidé de profiter.
Une gorgée de soleil
La ville et son mouvement permanent nous cachent bien des choses. Ainsi, le retour du printemps, qui procède par des étapes subtiles, s’annonce par le retour d’une lumière toute particulière. J’aime voir les rayons audacieux percer la pénombre de la chambre tout ensommeillée. Retrouver les rayons rappellent combien ce contact avec la lumière a pu manquer. Le matin, de huit à neuf heures, le soleil transmet généreusement sa lumière authentique, défiant les nuages et les voiles épais qu’ils forment.
Douceur et reconnaissance
L’hiver chancelant est pareil à la neige qui fond et qui révèle ce qu’elle recouvrait de son manteau blanc. Aussi, toutes les pensées mises en retrait ressortent. En cette saison, on se sent revigorée, renforcée spirituellement. Les paroles pleines de reconnaissance montent aux lèvres, et l’admiration béate du monde chargé de couleurs et de senteurs authentique nourrit l’âme d’une façon bien particulière. Non que l’hiver ne concentre pas lui aussi ses trésors et ses bénéfices. Mais tout est soudaineté dans la transition vers le printemps. On se sent comme dans un long corridor où, abandonnant les rigueurs d’une saison glaciale et sa nuit profonde, on marche vers une lumière éclatante. Le long de ce chemin des fleurs et des feuillages sont disposés comme un indice supplémentaire qu’une nouvelle étape de l’année est sur le point de commencer.
Le printemps apporte aussi son lot de personnes à revoir, de sorties à faire, de projets à lancer, car on se sent comme enveloppée dans un halo de bonheur et d’espoir.
Et plein d’autres bonheurs indicibles
A l’entrée d’un jardin
Ueshima Onitsura (Haïku, Anthologie du poème court japonais, éd. Gallimard)
fleurit le blanc
d’un camélia
Les petits riens qui s’accumulent sont les marqueurs invisibles du bonheur dont on jouit réellement. Ecrire sur les émotions fugitives, c’est conscientiser enfin leur existence, et se rendre compte qu’une forme de bonheur est bien à notre portée. Un bonheur simple, un peu surprenant par sa soudaineté. Un bonheur généreux car il traîne derrière lui un cortège de lumières, de senteurs, de musiques. Tous les sens sont captés, pris par surprise et nous communiquent leurs effets à leur tour.
Quand ils parviennent à percer les nuages et à les écarter, c’est le ciel tout entier qui nous apparaît. Ce bleu épouse à merveille les contours difformes des quelques nuages mutins qui restent. Bleu, blanc : comme deux couleurs primaires qui annoncent la nouvelle d’une floraison prochaine. Traverser les rues désertes, c’est renouer avec le silence et apprécier la beauté d’une nature comme on le peut. C’est saisir au vol les belles manifestations de la création divine, et se rappeler la perfection de ce monde.